Interview que j’ai donné au Journal Pays Emergents.
Ma première question concerne la stratégie du gouvernement mongol vis-à-vis de ses deux puissants voisins ?
La peur associée à une méfiance traditionnelle vis à vis de la Chine est une réalité dans la société mongole. Malheureusement cette peur s’exprime par l’hostilité des mongols vis à vis des ouvriers chinois qui sont venus travailler en Mongolie.
Il est inopportun d’expliquer ce phénomène par un racisme offensif, mais à mon avis, il s’agit d’une fierté nationaliste défensive. Les patrons mongols préfèrent faire appel à des ouvriers chinois qu’ils considèrent plus fiables et plus compétents que les ouvriers mongols.
En revanche, la sympathie et la nostalgie de l’époque soviétique privilégient les relations politiques et commerciales avec la Russie. Mais d’une part la proximité géographique qui facilite les échanges commerciaux avec la Chine et d’autre part la demande des industries chinoises, entretiennent les échanges intenses avec le voisin du sud.
Même si l’exportation de charbon génère un revenu immédiat au gouvernement mongol, elle engendre aussi une dépendance vis à vis d’un seul pays. La priorité du gouvernement mongol est de diversifier ses partenaires commerciaux et dans ce but, l’Etat mongol cherche désespérément un « troisième voisin ».
D’autre part j’ai lu un récent article de vous dans le Monde au sujet des oligarques en Mongolie. La corruption est-elle très importante au niveau de l’état? Quelles en sont les conséquences sur la gestion de la rente minière et sur les relations diplomatiques et commerciales avec la Chine et la Russie?
Si les autorités mongols sont enthousiastes vis à vis du futur de la rente minière, ils sont aussi conscients du danger qu’une mauvaise exploitation peut représenter. Bien évidemment, par proximité géographique, les deux voisins jouent un rôle primordial dans l’exploitation et dans la commercialisation des produits miniers.
Mais à présent, les grands sites de charbon proches de la Chine sont intensément exploités principalement par les compagnies chinoises associés avec les oligarques mongols qui acceptent de vendre aux chinois les charbons à des prix très inférieurs aux prix pratiqués sur les marchés internationaux. La Chine gère l’exploitation des mines de façon exemplaire et respectueuse à l’environnement, ce n’est pas le cas de la Mongolie.
Le gouvernement mongol a distribué trop de licences d’exploitation à des compagnies minières en peu de temps sans calculer la conséquence que l’exploitation intense peut engendrer. La plupart des titulaires de ces licences sont les oligarques à la tête de l’Etat.
Dans un tel cas, il me semble impossible de croire que l’actuel gouvernement mongol a une bonne stratégie durable concernant l’exploitation des mines.
Chimegmaa Orsoo